Le bécasseau variable

Mise à jour le

Nom latin : Calidris alpina

Le Bécasseau variable est l’un des plus petits et des plus fréquents des limicoles en Europe.

Comme son nom l’indique, le Bécasseau variable arbore un plumage qui évolue au fil des saisons. Au printemps, son corps présente une teinte brun-roux tachetée de noir, avec une plaque ventrale noire. Les adultes en automne peuvent garder assez tard des vestiges de noir au ventre. En hiver, son plumage devient brun-gris sur le dessous, tandis que son ventre vire au blanc. En vol, outre le ventre noir, la barre alaire blanche est étroite et peu contrasté, ce qui le distingue du sanderling. Ce limicole mesure entre 16 et 22 cm. Son bec noir, de taille moyenne et légèrement arquée, complète son apparence, tout comme ses pattes également noires. Avec une envergure pouvant atteindre 40 cm, un poids inférieur à 50 g, cette espèce présente une espérance de vie maximum de 20 ans environ.

Le Bécasseau variable est présent sur tous les continents, à l’exception de l’Amérique du Sud. Il évolue principalement sur les côtes maritimes, mais aussi à proximité des eaux intérieures. Ces oiseaux se déplacent souvent en bandes compactes, pouvant rassembler plusieurs milliers d’individus. Lorsqu’ils volent, ces groupes démontrent une impressionnante coordination, changeant de direction d’un seul mouvement. Ce comportement, associé à leur capacité à alterner l’exposition de leur plumage sombre et clair, perturbe efficacement les prédateurs.

Dix sous-espèces ont été identifiées sur la base de critères morphométriques et de variations de plumage, dont quatre fréquentent la voie migratoire Est-Atlantique (qui inclut la France). La sous-espèce alpina, qui hiverne en France, occupe une aire de répartition s’étendant du nord-ouest de l’Europe et de l’ouest de la Méditerranée jusqu’au nord-ouest de l’Afrique. Sa population est estimée à 1,3 million d’individus, avec un peu plus de 311 000 hivernants en France.

Le nom d’espèce "alpina" est étonnant pour un oiseau inféodé aux littoraux. Il évoque son habitat de nidification dans des régions froides et arctiques.

En France, Alpina est présent sur le littoral de septembre à mai. La sous-espèce Artica passe en aout-septembre et avril-juin et la sous-espèce Schinzii vers la fin juillet.

Le Bécasseau variable est fidèle à ses sites de nidification, situés dans des milieux ouverts à végétation rase d’Islande, d’Europe du Nord, de Sibérie, du Groenland et du Canada. La reproduction commence fin avril, peu après la fonte des neiges, et les pontes, composées généralement de quatre œufs, se déroulent à la fin mai. Ces oiseaux deviennent extrêmement discrets dans la végétation durant cette période. Le succès de reproduction dépend largement des températures.

En dehors de la saison de reproduction, le Bécasseau variable adopte un comportement grégaire et reste fidèle à ses voies migratoires ainsi qu’à ses sites d’hivernage. Sa migration, qui débute dès la fin juillet, peut couvrir jusqu’à 4 000 km sans escale, permettant à ces oiseaux de rejoindre des latitudes plus clémentes pour l’hiver. Il peut parcourir plus de 10 000 km/an. Le Bécasseau variable adopte diverses stratégies de migration. Certains individus privilégient de longues traversées au-dessus des mers, parcourant des milliers de kilomètres sans escale, tandis que d'autres optent pour une progression plus graduelle en suivant les littoraux, multipliant les haltes sur leur parcours. En vol, le Bécasseau variable atteint des vitesses remarquables, comprises entre 72 et 88 km/h, une performance impressionnante pour cet oiseau de petite taille.

Principalement côtier, le Bécasseau variable se nourrit dans les zones intertidales vaseuses à sablo-vaseuses, ainsi que dans les lagunes. À l’aide de son bec sensible, il sonde le sable pour détecter des proies jusqu’à 2 cm de profondeur. Leur technique de recherche de nourriture est fascinante : ils enfoncent leur bec entrouvert dans le sédiment avec des vibrations rapides de la tête. Ce mouvement précis et saccadé, tel une aiguille de machine à coudre, leur permet de détecter et de capturer efficacement leurs proies. L'ingurgitation des proies est facilitée par la structure remarquable de leur langue, dotée de papilles latérales garnies d'épines de kératine.

Les proies les plus recherchées sont les petits crustacés (genre Corophium, Carcinus, Crangon…) et les gastéropodes du genre Hydrobia et Littorina. Des végétaux et du microfilm algal (diatomées) seraient également consommés de manière incidente. Plus en profondeur dans les vasières, les proies recherchées vont être principalement des annélides (genre Nereis, Scoloplos, Arenicola) et des bivalves de petite taille (moins de 2 cm) du genre Macoma, Scrobicularia ... Ce petit limicole joue un rôle clé dans les écosystèmes côtiers. En fouillant les vasières pour se nourrir, il participe à l'oxygénation des sédiments, favorisant la biodiversité benthique. L'activité du Bécasseau variable est rythmée par les marées, alternant périodes d'alimentation à marée basse et phases de repos à marée haute. À marée haute, les Bécasseaux variables se rassemblent en bandes compactes sur des zones exondées et paisibles. Ces reposoirs, toujours à proximité de l'eau et souvent dans des zones protégées, leur permettent de se reposer en sécurité jusqu'au prochain cycle de marée.

Le Bécasseau variable privilégie fortement les baies et les estuaires qui accueillent plus de  90 % des effectifs. Le Bécasseau variable est considéré comme menacé au niveau européen. Sur les sites protégés, peu dérangées, les effectifs ont progressé ces dernières décennies. Chaque année, la Réserve naturelle accueille en moyenne 2 000 Bécasseaux variables, avec un maximum enregistré de 4 513 individus le 15 janvier 2002. Ces chiffres témoignent de l’importance de ces espaces protégés pour la conservation de l’espèce.